ST on FACEBOOK

DOWNLOAD NOW


Stereotree's
5 Years

Velvet Grooves
(5 Years Edition)

COQ
(Chapitre I)

Paul Pre
"Nu Sounds Mix"

ARCHIVES

CONTACT

rip@stereotree.net
onelight@stereotree.net

03/09/2009

[Focus] Grandeur et décadence...

En cette fin de décennie, nombreux sont ceux qui considèrent que le rap français (du moins celui que l'on a connu dans les 90's) a un pied enfoncé bien profond dans la tombe qu'il s'est creusé lui-même, à défaut d'être totalement mort. En effet, dans un paysage moribond digne de Verdun version 1918, les sorties de qualité se font très rares voire inexistantes, les MC's alliant talent et rayonnement médiatique se comptent sur les doigts d'une main et le marasme ambiant au niveau artistique n'inspire que peu d'espoir d'embellie.

Toutefois, en grattant bien l'épiderme putréfié de notre bon vieux rap hexagonal, en écartant les nombreux et pathétiques pantins aux visages et aux sons agressifs et/ou clownesque, on arrive toujours à retrouver quelque peu de la sève sacrée qui avait donné ses plus belles heures de gloire à cette musique.

L'année 2009 est un exemple prégnant de cet état de fait bien triste. Parmi les innombrables et innommables albums pullulant dans les bacs ou sur la toile, parmi cette violente masse de testostèrone vaine, de bêtise crasse et d'indigence artistique, il est bien difficile d'en extraire quelque chose de réellement intéressant et abouti. En fin de compte, point de demi-mesure, ça se compte sur les doigts d'une main (je vous avais prévenu), si l'on est réellement exigeant.

Tout d'abord, et sans surprise, on retrouve le corpulent Oxmo Puccino. Le MC, qui aujourd'hui oscille sans trop défaillir entre un rap easy-listening et un slam grand public, a pondu un album qui malgré ses défauts (les tracks trop faciles, justement, ou encore un manque de profondeur artistique) tient debout, sans doute grâce au charisme et au talent d'écriture de son auteur. Il ne fait nul doute que l'homme tient une place à part dans l'échiquier, solide comme une tour et osant la diagonale tel un fou. On attend toutefois de lui qu'il soit réllement plus aventureux à l'avenir, ou bien le risque de devenir lisse et sans saveur verra le jour inéluctablement.

Ensuite, et il s'agit là aussi d'un pilier, intéressons-nous au trublion Disiz. Lui aussi aussi doué d'un sens aigu de l'écriture (bien que moins nébuleux comparé à Oxmo), le MC du 91 a l'étonnante capacité d'avoir à la fois un profil grand public tout à fait respectable et un profil plus audacieux, tant dans la forme que le fond. Disiz apporte une réelle intelligence et maturité au rap français (qualités qui lui font le plus défaut, soyons clairs), et "The End", son dernier LP, en est la preuve flagrante. Le jeune homme, dorénavant père de famille, offre une musique, certes parfois mainstream dans la forme, mais jamais dénuée de sens et encore moins de pertinence. Et puis cet album, c'est aussi un chant du signe, où Disiz, visiblement dégouté de la tournure qu'a pris le Hip Hop en France, préfère se tourner vers d'autres horizons moins sombres, à l'image de son passage au sein du groupe electro/hipster qu'est Rouge à Lèvres...

Un peu plus profond dans l'underground, on peut aussi retrouver l'impertinent Le Vrai Ben, plus connu comme étant Ben, MC du quatuor tonitruant qu'est Le Puzzle. Là encore, à l'instar de Disiz, il nous a offert un album en forme de page tournée, au titre si juste aujourd'hui, "Suicide Commercial". Alliant humour cynique, sens de la formule et boom bap lourd, Le Vrai Ben n'a certes pas eu un rayonnement gigantesque, mais a su prouver à ceux qui s'étaient penchés sur son cas qu'il était l'un des MC's les plus intéressants et l'une des plus fines plumes de l'hexagone.

Dans une démarche bien différente, on compte aussi le détestable Teki Latex, dorénavant nommé Tekitek. L'homme en a agacé plus d'un avec ses postures suintant la bourgoisie et la prétention, ces albums (groupe et solo) fleurant la pop 80's et les refrains faciles, mais quoiqu'il en soit le membre de TTC reste un précurseur sur le sol français (voire international) et est loin de manquer de talent. La preuve en est son récent street album "Mes Pelures Sont Plus Belles Que Vos Fruits", dont le titre est à la fois symptomatique de son ego et de son génie aléatoire. Le seul track "L'Envol Du Corbeau", egotrip crépusculaire et électrique, résume totalement le lyricisme de haut vol dont sait faire preuve Teki, le plaçant la tête et les épaules au dessus de la masse grouillante et vociférante. Quand il daigne en faire l'effort, l'odieux personnage sait aussi reprendre sa place légitime dans l'élite rapologique, mais toujours dans la marge...

Eux aussi dans la marge, reste enfin les héroiques D3CCPT. Chroniqués et supportés dans nos lignes, mais somptueusement ignorés par le "gratin" de la presse rap, les 3 MC's, véritables vétérans de l'ombre (Vestat, moitié de Basic, Kwame, ex-journaliste à Radikal, et Géa, activiste des soirées nu soul), nous ont livré l'un des albums les plus intéressants et vivants depuis belle lurette avec "The Movement". Certes, leur ambivalence linguistique les met à part dans notre démonstration, mais ils ont néanmoins fait preuve d'une audace artistique (que ce soit en termes de flows ou de beats) rarement entendue ici depuis l'époque Time Bomb/Afro Jazz/La Cliqua. Malgré tout, l'effort fut éphémère, les MC's étant retournés à leur occupation solo, officiant de nouveau dans l'ombre de cette culture...

Le constat, s'il n'est pas désespéré, est donc bien triste. Tous les artistes cités ont peu ou prou dépassé la trentaine (le bon rap doit-il avoir du vécu?), et certains d'entre eux ont déjà plus ou moins tiré leur révérence. Alors, le futur, que nous réserve-t'il? D'ici la fin de l'année sont programmés quelques opus intriguants, dont par exemple celui de Rocé ("L'Être Humain Et Le Réverbère"), dont la qualité textuelle et la maturité n'est plus à démontrer, mais le MC est lui aussi un vétéran. N'y a t-il plus de jeunes têtes pour reprendre le flambeau d'un certain rap?

Si l'on cherche un tant soit peu, on peut tout de même dénicher de quoi croire en des jours meilleurs. Tout d'abord, Fisto, qui n'est certes pas un rookie, mais tout de même relativement jeune en terme de sorties, et qui travaille actuellement sur son album solo produit par les sympathiques Soul Square (ex-Drum Brothers). On est en droit d'attendre une fine plume, un regard différent, ainsi qu'une fraîcheur toute provinciale et carrément bienvenue.

En fouinant encore, on apprend qu'Artik, le tueur à gages des End Of The Weak, fignole son LP "Produit Par La Vie", et devrait quand à lui ramener le flow et la technique au premier plan (chose bien rare en ces temps de disette), sans jamais négliger une vision du quotidien et du rap game bien à lui. Autre premier opus à sortir,"Je Vous Aime" de Taïpan, MC impertinent de l'Est de la France, dont la nonchalance et l'arrogance n'ont d'égal que son efficacité au micro. Le jeune homme est un redoutable punchliner qui devrait sans nul doute marquer les esprits...

De quoi ne pas totalement tourner le dos au genre et ne pas prononcer la mort d'un certain rap français. Certains trouveront sans doute que cette vision est dure, d'autres complaisante, elle a le mérite d'exister et exprime un point de vue à un moment donné. Les années 90 nous avaient habitué à une certaine qualité et quantité de sorties, qui avaient réellement marqué les esprits. Le fait est qu'aujourd'hui, le phénomène est rarissime. Il va de soi que chacun pourrait ajouter ou retirer un nom de la liste, mais tel n'est pas le propos. Et précisons qu'il ne s'agissait pas non plus de baver sur le mauvais rap français, il est facile de lire entre les lignes ou de zapper sur les chaînes musicales pour comprendre de quoi ou de qui l'on parle. Bref, on en reparle au prochain état des lieux...

4 commentaires:

haro a dit…

bel article!!!

sinon je pense que chien de paille auraient mérités quelques ligne, mais s'il est vrais qu'on les a pas entendus depuis trop longtemps

giul a dit…

ben le rap français j'ai l'impression que c'est un eternel ping pong entre la street credibility et la Radio France credibility ,
pour faire de bons albums faut au minimum dire fuck aux 2...
c'est pas gagné

YaTrend a dit…

Tu m'etonnes avec un public si conservateur pendant la belle époque c'est normal que ça ce soit cassé la geule, dès que un groupe essayait d'inover ça n'était fini pour eux; impossible d'envisager du long terme avec ça. Le public doit servir de contre poids vis à vis des médias qui tendent à encourager la redondance et la répétition des formules qui marchent.

Supafuh pour CPLB a dit…

Et Pumpkin alors? ahahhaha!!!!